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«Je m'efforcerai d'être un serviteur honnête, soucieux de rassembler la matière susceptible d'être utile, par la suite, à une main plus experte», note la jeune Virginia Woolf, apprenti écrivain passionné déjà dévoué corps et âme à la genèse d'une oeuvre qui comptera parmi les chefs d'oeuvres du XXe siècle. Son Journal d'adolescence s'ouvre en 1897, alors qu'elle a quinze ans. L'écriture, d'emblée, s'y révèle salutaire pour la jeune fille au talent précoce. Refuge contre la douleur lorsqu'elle perd ses parents ; garde-fou contre la folie qui rôde.
Mais ce Journal est avant tout un cahier où Woolf s'applique à faire des phrases comme on fait des gammes, en se moquant d'elle-même. Et des autres, tant elle excelle à épingler d'un trait caustique visiteurs et auteurs lus. Car l'adolescente lit sans se rassasier : Aristote et Hawthorne, James et Hardy. Passant son esprit au tamis de la bibliothèque familiale, elle exerce son jugement critique et affine sa singularité propre.
Puis, au fil des années, l'apprentissage livresque se double de séjours à l'étranger. Les cahiers deviennent alors journaux de voyage, en Grèce, en Turquie, en Espagne. Loin d'y céder à la tentation d'un exotisme de convention, l'écrivain en devenir s'interroge sur la manière d'embrasser le vivant sans le figer, se plaçant déjà à rebours des canons en vigueur, des mécanismes romanesques faciles.
Au seuil de son entreprise littéraire, la grande Virginia Woolf touche déjà du doigt son génie à venir.