Eddy Wiggins : le noir et le blanc

Tous ces couples transfuges de l'ordre racial, Wiggins l'Afro-Amérindien, Edgar le Rouge et le Noir, n'aura de cesse de les «chasser» pour mieux en louer la beauté plastique et fixer sur pellicule, à l'adresse de ses contemporains outre-Atlantique, la transgression joyeuse qui chez eux condamne jusque dans les années 1960 à une mise au ban. Fasciné, il les saisira, les suivra dans la nuit des bars et des clubs où ils dansent enlacés, certains flirtant, d'autres s'étreignant à pleine bouche dans le noir, et il les poursuivra encore, pour aller au bout de l'histoire, connaître la fin de leur roman [...]. Le désir de ces amants-là peut bien faire exploser leurs coeurs et leurs corps, ce qui surgit dans la photo d'Eddy, ce qui noie son regard et submerge l'image pour déborder du cadre, c'est son amour à lui, incommensurable, son désir d'eux, d'être eux, parmi eux, réconcilié peut-être, en paix avec les esprits du Mississippi et les démons sacrés des marais.