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Tous les habitués de Saint-Germain-des-Prés connaissent Ali : il est une des figures indispensables du quartier. Son métier ? Vendeur de journaux à la criée. Inlassablement, il arpente le boulevard, Le Monde ou Le Journal du Dimanche à la main, et doit son incroyable notoriété à son imagination débordante : les «unes», souvent sinistres, sont détournées, quand elles ne sont pas tout à fait issues de l'imaginaire d'Ali. On dit souvent que l'humour est la politesse du désespoir ; Ali a fait de cette maxime plus qu'un fonds de commerce, une véritable devise. Pour faire rire, mais aussi pour surmonter la brutalité de son parcours.
Né au Pakistan dans une famille nombreuse dont le père a souvent la main lourde, il se retrouve à l'âge de cinq ans dans la rue à travailler afin de ramener de l'argent à la maison. S'il revient bredouille, il est obligé de passer la nuit dehors, exposé aux menaces de la prostitution et de la violence. Seul refuge de ce petit garçon qui reste malgré tout rêveur, la lecture et une soif d'apprendre qui ne le quittera jamais.
À 18 ans, il quitte enfin sa famille et s'embarque comme mousse sur un bateau. Commence alors pour lui un long périple au cours duquel il vagabondera de la Grèce à l'Afghanistan, en passant par la Chine, pour débarquer un beau jour en France. Il subsiste grâce à des petits boulots, trouve refuge dans des chambres sordides, le plus souvent sous les ponts. Ali rencontre le professeur Choron, qui lui offre un abri, un local à Charlie Hebdo, et un premier emploi : vendeur de journaux. Depuis 30 ans, Ali parcours quotidiennement des dizaines de kilomètres. Ces journaux auront été son passeport pour une vie plus heureuse pour lui et pour les siens.
Personnage attachant et volubile, Ali déroule dans ce texte le fil d'une vie hors norme, et d'un combat quotidien en vue de son intégration. De son enfance misérable aux galères de l'exil et de la clandestinité, des boulots précaires et des mauvaises rencontres... jusqu'à la paix d'un foyer. Une vie «normale», gagnée de haute lutte.