Pierre Vaux, instituteur
Une vie sacrifiée
L'affaire Pierre Vaux est un des grands crimes judiciaires de l'histoire du XIXe siècle. Moins connue que l'affaire Dreyfus elle n'en est pas moins aussi dramatique. Elle l'est sans doute même davantage puisque le pouvoir a nié l'innocence d'un homme durant près de cinquante ans, jusqu'à sa réhabilitation à la fin du siècle. Pierre Vaux devint instituteur en 1844, dans un petit village aux confins de la Saône-et-Loire. Il s'est efforcé de faire le bien pour soulager un peu la misère qu'il voyait autour de lui. La répression qui se met en place après 1848, relayée au village par la cupidité d'un homme et au tribunal par des magistrats sans scrupules, va l'envoyer mourir à Cayenne. Pour se débarrasser de lui, on le désigne complice des incendies qui détruisent les trois quarts du village en moins de dix ans. Durant vingt-cinq ans, depuis son enfer, il ne cesse de crier et de démontrer son innocence à l'aide des faits nouveaux qui confondaient ses accusateurs.
Le drame de l'affaire Pierre Vaux doit être connu pour lui rendre justice, mais cette histoire ne suffit pas. Il est nécessaire de savoir comment ce fils de paysan, orphelin très jeune, vivant dans un milieu modeste est devenu un homme cultivé, épris de justice et de vérité, capable de traverser les pires épreuves avec une force rare. La première éducation à l'école et dans la famille, la formation dans l'une des premières écoles normales, les bouleversements politiques sont autant d'éléments qui ont pris part à la construction d'un homme hors du commun dont les idéaux sont venus se fracasser sur la bassesse humaine.