Fin de bobine

Fin de bobine

« Nous roulions à cent trente kilomètres à l'heure et pourtant j'avais le sentiment étrange que mon passé me rattrapait. Dans le rétroviseur je voyais : mon enfance, mes parents, mes études, mon mariage, mes films, tous étaient là, juste derrière mon épaule. Ils gagnaient du terrain comme pour s'agripper à moi. Je ne voulais pas les voir, me retourner et sentir leur présence si insistante. Pourquoi n'étaient-ils pas restés à Paris, dans le livre de mes souvenirs ?

Que voulaient-ils me dire ? Que voulaient-ils m'apprendre que je ne connaissais déjà ? Oui j'avais peur et j'avais honte à mon âge d'avoir si peur. J'ai toujours essayé d'éviter la fuite. Nous le savons tous, on ne règle rien en fuyant et pourtant...

J'avais appris à toujours affronter les aléas de l'existence, les épreuves. Je m'étais construit un mental de guerrier et un corps en armure. Pourtant cette fois rien n'y faisait.(...) Non vraiment, je me sentais comme un chien que l'on emmène chez le vétérinaire pour le piquer. L'instant où son maître ouvre la portière il n'a pas besoin d'explication, il a déjà tout compris. Tout est dans le regard.

Oui, je n'ai pas honte de le dire, j'étais mort de peur. »

A quatre-vingts ans passés, Louis est un vieux metteur en scène de cinéma. Au lendemain de la remise d'un prix prestigieux pour l'ensemble de sa carrière, il quitte Paris pour la Suisse. Une nouvelle vie l'attend, une vie qu'il n'a pas souhaitée mais qu'il doit accepter...