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Pamphlétaire redouté, critique d'art doté d'une espèce de prescience et justicier des Lettres, Octave Mirbeau (1848-1917) a été le grand démystificateur, l'incarnation de l'intellectuel engagé, libertaire et dreyfusard, et, selon Apollinaire, «le seul prophète de ce temps». Dramaturge à succès, qui a triomphé, depuis près d'un siècle, sur toutes les scènes du monde avec Les affaires sont les affaires, il est aussi et surtout un romancier puissant et original, qui a connu tout à la fois l'admiration des happy few (Tolstoï, Mallarmé, Rodenbach, Remy de Gourmont, Marcel Schwob) et les gros succès de librairie. Malheureusement, ses deux romans les plus célèbres, Le Journal d'une femme de chambre et Le Jardin des supplices, traduits dans une vingtaine de langues, ont fait quelque peu ombrage à ses autres œuvres, alors qu'il a contribué, plus que tout autre au tournant du siècle, avec Les 21 Jours d'un neurasthénique ou La 628E-8, à l'évolution d'un genre qu'il jugeait condamné. Tant par les thèmes traités, plus que jamais actuels, que par le renouvellement de la forme romanesque, Mirbeau apparaît aujourd'hui comme le romancier moderne par excellence.
Mais, pour prendre conscience de son importance historique, il fallait établir la première édition critique de son œuvre romanesque intégrale. Et, pour comprendre et apprécier son évolution, il fallait défricher et explorer le massif insoupçonné de sa production de jeunesse : cinq remarquables romans parus sous pseudonyme au début de sa carrière sont donnés ici, en annexe, pour la première fois.