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Quand on est enfant, on ne comprend pas toujours les adultes, leurs joies, leurs douleurs, leurs passions. On ne sait pas sur qui s'appuyer. Jeanne Champion répond : sur ses grands-parents, ce socle indispensable. Aussi s'adresse-t-elle à ses grands-mères, figures inoubliables, à ses grands-pères, pleins de pudeur et de silence, et encore à ses oncles, à ses tantes, bref, à toute une famille menée par la fureur et les excès, au fil des années 30.
Pour parler de l'enfance Jeanne Champion a des mots qui frappent au cœur. Ecoutons-la :
«... Ca n'a guère plus de sept ans, et ça comprend déjà ce qu'endure une mère malheureuse. Ca promet du vice et c'est déjà moraliste. Ca ne comprend rien au sexe, et pourtant ça connaît tout du calvaire vécu dans les ténèbres, en cette horizontalité où les femmes violées deviennent des crucifiées. Ca a une langue bien pendue, et pourtant ça garde le silence face au père. Ca voudrait sauver le monde, y compris ses ennemis, mais ça n'en a pas les moyens. Ca incite les garçons à pisser dans le bénitier pour se moquer des grenouilles qui se signent dans la pisse ; et pourtant ça ne songe qu'à l'enfer. C'est une enfance tiraillée entre les saints et les démons, l'amour et la haine, l'idolâtrie et l'irrespect...» J. C.