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Riche de près de 300 lettres, la correspondance inédite entre Freud et la plus jeune de ses filles, Anna, est un document exceptionnel. Tout au long de cette chronique de la vie d'une famille viennoise pendant les premières décennies du XXe siècle, on découvre l'homme Freud travaillant à son oeuvre et à sa pratique clinique et s'intéressant aux détails de la vie quotidienne.
Mais c'est la psychanalyse qui scelle d'une manière singulière la relation entre le père et sa fille : «Je vois à présent, en te regardant, combien je suis vieux, car tu as exactement l'âge de la psychanalyse. Vous m'avez toutes deux causé des soucis, mais au fond j'attends quand même plus de joies de ta part que de la sienne», lui écrit-il à la fin de 1920. Cette comparaison montre à quel point, en ses commencements, la psychanalyse s'éprouve en famille et dans le cercle des initiés. Freud observe l'activité onirique de sa fille, une enfant tourmentée, avant de devenir à deux reprises, entre 1918 et 1924, son analyste.
L'expérience est décisive. Anna s'implique dans l'International Psychoanalytical Association dès sa création, fréquente ses membres, se fait même courtiser par quelques élèves de son père. Mais, disciple fervente, elle se consacre à la thérapie des enfants et devient dans ce domaine la principale représentante de l'école viennoise face à sa grande rivale de l'école anglaise : Melanie Klein. Après l'exil de la famille en Grande-Bretagne en 1938, le conflit se poursuivra mais se soldera, en plein coeur de la Deuxième Guerre mondiale, par une entente cordiale entre les différents courants.
Document historique précieux, cette correspondance, qui s'étend sur plus de trente ans, témoigne d'un moment essentiel de l'histoire de la psychanalyse, avec ses passions et sa formidable volonté de transformer la subjectivité humaine.