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La Collaboration, avons-nous tous appris, est la conséquence de la terrible défaite de 1940. Mais si la défaite avait été elle-même le résultat d'une «collaboration» déjà fort bien anticipée entre une fraction de l'appareil d'État et des milieux d'influences français, et un déjà quasi-occupant nazi ?
La question est taboue. De plus, comment imaginer que, tel le joueur de flûte d'Hamelin, les ennemis acharnés de la démocratie fusionnés avec les stipendiés de Berlin et de Rome aient pu si efficacement, et dans les normes du secret, faire d'une part suffisante du haut personnel de la Troisième République les complices de sa destruction ?
Comment ? Il fallait d'abord rouvrir le dossier, bien scellé par ce qui nous restait d'illusions, et revenir aux archives. Le constat est accablant. Annie Lacroix-Riz a réuni les mille pièces à charge d'une incontestable entreprise de subversion de l'État républicain.
Il fallait ensuite reconstituer ces cheminements de corruption et de connivence qui ont fini par placer le centre de gravité de la trahison au coeur même de l'État. S'il est un mythe intenable, c'est celui d'un complot aux franges, de l'autre côté d'une ligne Maginot de sécurité républicaine qui aurait tenu jusqu'à l'invasion : en réalité, toute une chaîne de complicités, de l'extrême-droite aux rassurants radicaux, en passant par l'État-Major, a voulu la mort du régime. À n'importe quel prix.
Mais pourquoi, dira-t-on ? Difficile de le comprendre sans un retour sur les enjeux de l'époque. Comme nous ne voyons plus bien les raisons du crime, nous sommes tentés de penser qu'il n'a pas eu lieu. Mais les raisons étaient bien là, et l'auteure nous les rappelle avec une froide rigueur.
Certaines n'ont peut-être pas complètement disparu : ce vieux malaise d'une part de nos élites avec le double fait national et démocratique...