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Au début du XXe siècle, un diagnostic s'impose : « ordonner à des fins européennes le reste du monde » (Valéry) n'est plus vraiment possible. La sympathie que nous éprouvons aujourd'hui encore pour cette « politique de l'esprit », malgré son échec, doit être interrogée. Ce constat lucide reposait sur une distinction rigoureuse entre une Europe de la politique et une Europe de l'esprit. Mais aujourd'hui cette distinction semble brouillée. À la victoire, dans le monde entier, du capitalisme et du libéralisme, issus de notre vieux continent, correspond une responsabilité universelle. Nous, Européens, et plus précisément nous, intellectuels, devons reconnaître qu'il nous faut assumer cette responsabilité, sans chercher à nous cacher derrière l'utopie socialiste des fins, ni derrière l'utopie capitaliste des moyens. Le temps des utopies est peut-être révolu, mais nous ne devons plus trouver refuge dans la mélancolie.
Existe-t-il une tradition des Lumières qui ne soit pas eurocentrique ? Bien des choses dépendront des réponses que nous apporterons à cette question.