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Tout ce territoire appartenait aux O'Neill, et ce Depuis toujours.
Voici l'histoire de Hugh O'Neill, seigneur d'Ulster, qui vécut entre deux mondes : la terre d'Irlande, celle des contes et des légendes où les sidhe protègent les O'Neill, et l'Angleterre, où il a été élevé, afin qu'il puisse « comme un jeune faucon, revenir plus volontiers au poing anglais ».
Quand la reine Élisabeth lui susurre ordres et mots doux à travers un miroir enchanté par un mage de sa cour, John Dee, les anciens peuples d'Irlande, sortis de terre pour en faire leur champion, mettent en lui leur espoir de victoire et d'indépendance.
John Crowley conte la chute d'un homme ; et celle, plus grande encore, d'une culture - sa magie, ses histoires, sa langue. Mais si ces disparitions semblent refléter l'inéluctabilité de nos destins, nous sommes de fait les porteurs de nos histoires, car nous les écrivons nous-mêmes.
La fin d'un temps n'est pas la fin du poète.
L'histoire de Dar Duchesne, narrée dans le très beau Kra, de John Crowley, sonnait comme une forme de testament littéraire pour l'auteur, reprenant la majorité de ses thèmes de prédilection. Le fait que Crowley lui-même ait laissé entendre que ce serait là son dernier roman donne à ce nouvel opus, une saveur particulière, l'impression - souvent présente dans son oeuvre - de chemins qui se rouvrent pour un bref moment.
Le Silex et le miroir chatoie d'un imaginaire subtil. Le merveilleux est interstitiel à tout ce qui y est décrit. Cette magie omniprésente est nichée si profondément dans la fabrique du monde qu'elle s'y confond, et devient invisible sauf pour certains témoins privilégiés, dont les lecteurs.
Comme Kra, Le Silex et le miroir est une fable mélancolique, évoquant des potentialités qui s'étiolent, des opportunités qui se ferment, la fin de la magie et d'un temps. Mais si ces disparitions semblent refléter l'inéluctabilité de nos destins, nous sommes de fait les porteurs de nos histoires, car nous les écrivons nous-mêmes. La fin d'un temps n'est pas la fin du poète.
Patrick J. Gyger, avril 2023
« Il y avait toujours eu un O'Neill investi à la pierre du couronnement de Tullahogue au son de la cloche de St Patrick, mais Conn O'Neill, comte de Tyrone, s'était agenouillé devant le roi Henri, de l'autre côté de la mer, et avait promis de planter du blé et d'apprendre l'anglais. Et, à l'approche de la mort, il avait dit qu'il fallait être fou pour faire confiance aux Anglais. »