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Un regard qu'on croise fêle d'infini ce visage ; il n'entre en commune mesure avec rien qui soit au monde. Au point d'ailleurs qu'on ne le supporte pas, ou qu'il en paraît indécent et qu'on a tôt fait de détourner les yeux. Or, de quoi cela est-il si discrètement - mais indéniablement - la révélation ?
Comme il y a de l'incommensurable autour de certains nombres qui, jusque dans la plus grande proximité, maintiennent un écart irréductible avec les autres, nos vies sont traversées par de l'incommensurable.
Mais nous sommes portés à le rabattre comme à l'éviter pour ne pas avoir à l'affronter.
Il est vrai que la société commensurabilise : l'argent, la « communication » ont fonction d'enfouir l'incommensurable au lieu d'en laisser entendre l'inouï.
L'incommensurable laisse apparaître que l'infini n'est plus à reporter en bout, voire dans un « au-delà » de l'expérience, comme le voulait la métaphysique ; mais qu'il ne cesse d'infiltrer notre expérience et l'ouvre de l'intérieur au vertige.
Incommensurable de la jouissance en regard du plaisir, ou de l'intime vis-à-vis de la sociabilité ou de l'événement de la mort... N'est-ce pas en repérant ces fêlures d'incommensurable qu'on pourra déployer l'existence ? Sinon, elle est fastidieuse.
Car qu'est-ce qui ne se laisse pas intégrer dans la commune mesure du monde, mais qui n'est pas pour autant d'un autre monde ? Or c'est au nom de quoi l'on pourra s'élever contre l'inhumain du monde.
Un concept - l'incommensurable - ne pourrait-il pas changer la vie ?
F. J.