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Nous applaudissons toujours Molière avec ferveur, mais sommes-nous bien certains de le comprendre ? Les mises en scène les plus marquantes et les plus novatrices d'aujourd'hui font valoir sa profondeur psychologique ou l'audace de ses idées morales, mais parfois au détriment du rire joyeux et profond qui est la marque propre de son génie et qui donne le sens de son théâtre.
Un constat s'impose : on a tiré Molière du côté du drame, on l'a joué comme Ibsen ou Tchekhov, dans l'idée, peut-être, que la gravité, la tristesse et la mélancolie constituaient un label suprême de qualité.
Le malentendu n'est pas neuf. Il date au moins du Romantisme, mais il s'est accentué. Il est donc urgent de le dissiper pour réapprendre à lire Molière et surtout pour retrouver les plaisirs dont nous avons été privés.
Il faut tout d'abord oublier la distinction factice entre hautes et basses comédies, car l'esprit de la farce, que l'on fait profession de dédaigner, est omniprésent dans son oeuvre. La farce nous conduit dans l'étrange, dans un domaine à la fois hilarant et tout à fait sérieux où l'on triomphe, en riant, de la violence et de la mort.
Et il y a plus.
Certaines comédies-ballets sont jouées sans leurs parties lyriques, réduites au texte seul. C'est méconnaître gravement l'intention de Molière, baladin aux multiples talents, émerveillé dès les débuts de sa carrière parisienne et jusqu'à son dernier souffle par une forme neuve de spectacle et une vision plus large de la vie qui répondaient pleinement à son génie.
Le Rire de Molière offre une interprétation originale de son théâtre et de ses pièces principales. Michael Edwards y découvre un rire étonnant et salutaire aux antipodes du rire triste dans les théories de Hobbes, de Baudelaire, de Bergson, et un comique qui, en dépassant de loin la satire, cherche, au-delà du malheur, le bonheur d'un monde renouvelé.