La main d'Emeline : une autofriction

« De temps à autre, nous stoppions les machines, opérions des escales afin de vérifier la continuité de la barrière invisible à la limite du vide, au-delà du grand remblai de roche. La plupart dédaignèrent à la longue de s'y aventurer, certains de revoir les lieux à l'identique du précédent, déçus, au point que les deux seuls volontaires restèrent Émeline et moi. On nous débarquait par la chaloupe, nantis de la promesse de nous recueillir quelques heures plus tard. Nous avions contracté l'usage de pique-niquer au bord du monde. Au terme de la dînette, Émeline plongeait sa main dans une écuelle d'eau douce afin de se débarrasser des particules de talc noir et s'emparait de mon sexe par la béance de ma braguette. Elle me masturbait, la mine sévère, tant et si bien que nous approchant au plus près de la barrière, dans la densité de l'air, j'éjaculais avec force. Mon sperme la traversait et s'évadait en gouttelettes lactescentes dans l'éther, comme une étoile filante miniature. »

Roman d'aventures énigmatiques

En pleine Prohibition, le narrateur, un jeune homme adopté par un oncle trafiquant, découvre tout à la fois l'auto-érotisation et les combines suspectes de son parent qui les mèneront à naviguer sur le Stella, un vieux cargo, vers des contrées mystérieuses de l'Atlantique Sud.

À la fois récit d'apprentissage, réflexion sur la sexualité et roman d'aventures maritimes, le livre d'Yves Letort prend toute sa place dans le registre que l'on désigne désormais comme « romans monde ».