Le mal rôde

« Deux millions... Trois jours... Sinon ta grange brûlera. » Le même jour que les Constant, les Peyrit ont reçu une lettre anonyme. Sous la violence de la semonce, derrière leurs volets clos, Georgette et Louis Peyrit réfléchissent. Louis ne s'en laisse d'ordinaire pas imposer. Mais aujourd'hui, le maître-chanteur semble bien renseigné sur la récente bonne fortune des Peyrit. Ils devront payer. Bientôt, tous les habitants des Escros reçoivent le même type de menace. Lequel d'entre eux est le corbeau ? Le mal qui rôde exacerbe peu à peu rancunes et soupçons...

« Que feront-ils, si le bandit tient parole ? Leurs bêtes, privées de fourrage, vont dépérir, tomber malades. Incapables de les nourrir, ils devront en brader une part, décimer leur cheptel. Puis reconstruire - à leurs frais, certainement. Les assureurs ne sont pas moins avisés ni prévoyants que les malandrins : on a beau payer scrupuleusement ses primes, comment s'y fier, éviter la ruine ?

Toute une vie d'efforts, de labeur, et se retrouver seuls au bord de la nuit, sur la route grise, comme des traîne-misère. Trembler à l'idée que tout ce qu'on a vécu, réalisé avec tant de conviction qu'on osait sans emphase le croire définitif, ce monde, par le fait d'une simple lettre anonyme, puisse se révéler ce qu'il n'a jamais cessé d'être : une boule creuse. Un château de neige. Ils auraient dû s'en douter. Quel orgueil d'avoir cru que le sort pourrait les épargner ! Quelle déception et quelle angoisse à vouloir lire dans les mots sales qui les condamnent... »