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Jean Morin a existé. L'état civil en témoigne. Il est né le 9 septembre 1889 à Quessoy, dans un département que l'on nommait alors les Côtes-du-Nord. Il est mort dans les tous premiers jours de la Grande Guerre, au cours de la bataille de Charleroi. Puis il a sombré dans un oubli total.
Pourtant, en explorant les fonds d'archives, en croisant les sources et en revenant sur les lieux mêmes de son existence, il est tout à fait possible de retracer, précisément, la vie de Jean Morin. Son enfance, son éducation, son service militaire, sa mobilisation au sein du 47e régiment d'infanterie de Saint-Malo et même sa disparition, entre Sambre et Meuse, en Belgique, apparaissent comme ordinaires, normales. Et c'est précisément cette vie minuscule, à des années lumières des grands hommes tant célébrés, qui fait de ce jeune paysan trop tôt décédé un objet historique sans pareil.
Car écrire l'histoire de Jean Morin, c'est revenir sur les pas de celui qui pourrait être le petit-fils du Louis-François Pinagot, d'Alain Corbin ou le fils de la Lucie Baud de Michelle Perrot. C'est surtout esquisser le portrait de cette génération de Bretons dont la vie bascule en cet été 1914 de sinistre mémoire.