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Les Promesses du zéro
Dans le demi-siècle écoulé, certaines valeurs que la conscience esthétique pensait statutairement attachées à l'art ont été remises en cause.
Vous pensiez que l'art devait accroître vos compétences perceptives. Plongez les yeux dans Mirror Vortex de Robert Smithson et vous changerez d'avis. « Pourquoi ne pas reconstruire notre incapacité à voir ? » demande, en effet, Smithson à l'issue de son voyage au Yucatán. Glissez, dans un plein abandon, sur les toboggans de Carsten Höller, dans un musée transformé en amusement park, une autre interrogation vous viendra : « Pourquoi ne pas construire notre capacité à nous perdre ? ». Si vous croyiez aussi que l'art a pour vocation de donner du sens, il vous suffira de parcourir les livres d'Ed Ruscha pour comprendre que l'une des tâches de l'oeuvre peut être précisément de s'en abstenir - une photographie de station-service ne voulant être rien d'autre qu'une photographie de station-service. De ce littéralisme foncier, l'équation de Martin Creed se fait l'écho : « Le monde entier + l'oeuvre = le monde entier ». Quant à l'essence de l'art, dont le dévoilement, depuis Manet, était promis, les Furniture Sculptures de John M Armleder en ont résolument perdu le souci. Leur formalisme postmoderne met en scène sans désenchantement une réification qu'il offre même à notre jouissance, mais que les « situations scénographiées » de Tino Sehgal, que rien ne documente, ne désespèrent pas d'entraver.
Inaptitude à voir, sentiment de perte, absence de sens, quête du zéro, plaisir de la réification ou, au contraire, ultime tentative pour la déjouer, telles sont les singulières données que l'ouvrage de Michel Gauthier dégage à travers l'analyse de quelques-unes des oeuvres majeures de notre temps.