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Le patron
Le vent soulevait la neige grise et sèche ; dans la cour, où traînaient des brindilles de foin et des filaments de tille, se tenait un homme ventru, au visage boursouflé, vêtu d'une blouse tatare en toile de lin qui lui tombait sur les talons et chaussé de hauts caoutchoucs emboîtant ses pieds nus. Les mains croisées sur sa grosse panse, il se tournait les pouces et, me toisant de ses petits yeux, dont le droit était vert et l'autre gris, il me dit d'une voix aiguë et rouillée : « Va-t'en, va-t'en, il n'y a pas d'embauche. Il n'y a point de travail, l'hiver. » Son visage imberbe et bouffi se gonfla de mépris ; au dessus de la lèvre supérieure, la rare moustache blanchâtre remua ; la lèvre inférieure pendit en découvrant une rangée de petites dents serrées. Le vent furieux de novembre soufflant en rage sur l'homme houspillait les quelques cheveux plantés sur sa tête au grand front et soulevait la blouse jusqu'aux genoux. Comme il ne portait pas de pantalon, la bise dénudait ses jambes massives, lisses comme des bouteilles et couvertes d'un duvet jaunâtre. Cet être excita ma curiosité au suprême degré, parce qu'une lueur insolente jouait dans son oeil vert et parce qu'il était hideux. N'étant pas pressé, je voulus bavarder avec lui et lui demandai : « Tu es le gardien, hein ? »