Moana.
Moana, c'est le bleu absolu que prend l'océan quand le regard plonge vers l'abysse, vers le vertige sans fond qui s'ouvre au-delà du lagon, passé le récif-barrière. Moana, c'est la matière bleue, à la fois aussi présente au plongeur que sa conscience et aussi désespérément fuyante, aérienne et douloureuse.
Plonger dans le bleu, c'est la petite mort, le renoncement à l'être. C'est devenir soi-même, pour quelques instants d'éternité, onde traversée d'ondes, corps liquide et bleu. C'est perdre d'un seul coup les repères qui rassuraient. Le regard se noie dans le bleu, se voile au bord du vertige et se détourne en hâte vers la mosaïque familière du tombant ou le miroir brisé de la surface. Remontée hâtive, comme si le plongeur venait d'échapper à un risque. À la tentation de son propre gouffre.
Au-delà du moana le bleu devient noir. C'est 'ere'ere, le bleu noir qui précède les ténèbres. 'Ere'ere signifie aussi hématome. C'est la couleur des chairs meurtries, éclatées sous la pression, quand le gouffre recrache l'enveloppe. Quand le plongeur s'est uni à l'océan en se fondant à la matière, enfin apaisé, lui-même liquide et bleu.
Moana, c'est aussi un prénom.