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«Je t'aime et je veux coucher avec toi, cette concision n'est pas permise à l'amitié. Mais je le dis d'une autre voix, presque dans le sommeil, profondément dans le sommeil. Je sonne tout autre chose que la passion. Si tu me prenais contre toi, tu prendrais contre toi - les plus déserts lieux.»
Marina Tsvétaïeva à Rilke
Marina Tsvétaïeva, de France où elle vit exilée, entre en contact épistolaire avec Rilke, en mai 1926. À sa lettre, brûlante de dévotion envers celui qui est pour elle l'incarnation même de la poésie, le grand solitaire Rilke répond profondément touché. S'ensuit une correspondance passionnée de part et d'autre, une histoire d'amour et de mots. Entre ces deux poètes que séparent l'âge (il a cinquante et un ans, elle trente-trois), la langue maternelle (mais ils s'écrivent en allemand) et le style (elle violente, elliptique, lui orphique, élégiaque), l'échange est admirable d'entente, de profondeur et de franchise. Et en même temps, en contrepoint de ce dialogue au sommet, comme deux amoureux ordinaires, ils échangent photos et confidences, et font des projets.