Le travail d'insertion en mission locale

Créée en 1982, la Mission locale est devenue une sorte de médiateur entre les jeunes et un marché de l'emploi par trop sélectif. Du coup, en devenant un espace d'accueil, d'aide et de suivi des jeunes, cette institution opère une sorte de régulation de la demande en faisant intervenir un registre moral et pédagogique. Notre enquête sociologique qui porte sur une Mission locale du Pas-de-Calais accueillant quelque 7 000 jeunes, révèle que la qualification des 16-25 ans face au marché du travail n'est pas seulement professionnelle. Elle passe également par un apprentissage social d'un «savoir-être», allant de la définition d'un Projet professionnel réaliste à l'accès à l'autonomie et à la responsabilité en passant par la gestion du temps et l'assiduité. Cette socialisation des jeunes s'identifie à une insertion sociale censée préparer une insertion professionnelle à venir. Face aux injonctions institutionnelles, les jeunes développent des stratégies différentes marquées par l'histoire sociale de chacun et par la question du «sens» et de la crédibilité qu'ils attribuent à ces injonctions.

L'élargissement du champ de l'insertion témoigne à la fois du déclin de la société salariale et de la volonté institutionnelle et politique d'impliquer le public à «insérer» dans son parcours d'insertion. Le contenu de cette insertion reste aléatoire et irréductible à l'accès à l'emploi salarié classique. La rareté de l'emploi oblige à repenser le travail dans une société qui en fait le garant de la cohésion sociale et le terrain de l'expression identitaire.