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Si les romans de Joseph Sheridan Le Fanu (Irlandais, 1814-1873) sont tombés dans l'oubli, Uncle Silas, toujours réédité, n'a jamais cessé de répandre son charme maléfique. Ce portrait d'un être exceptionnel (dans le pire sens du terme), cette intrigue servie par une construction savante et méticuleuse font d'ailleurs dire à son éditeur américain, dans son introduction, combien il envie le lecteur qui aborde cette histoire pour la première fois.
Paru en 1864, L'Oncle Silas peut sembler bien tardif par rapport au roman gothique (il vient un siècle après Le château d'Otrante, de Walpole, un demi-siècle après Melmoth de Maturin) ; il s'inscrit pourtant bel et bien dans son sillage. Le roman regorge d'éléments gothiques : grandes maisons sombres et mystérieuses, crime en vase clos, étrange testament, jeune demoiselle en détresse, mariage forcé et consanguin. Toutefois, s'il pactise avec le genre, il s'en détache par son originalité. Certes, il évite le principal ingrédient de base et se termine le plus rationnellement du monde sans que jamais la protagoniste ni le lecteur ne pensent à quelque intervention fantastique. L'héroïne doit combattre des humains non des spectres. Néanmoins le surnaturel apparaît par petites touches (dans le décor, dans la manière dont l'héroïne interprète certaines manifestations extérieures). L'Oncle Silas unit donc les deux pôles du roman gothique. Le roman doit aussi sa singularité à ses multiples allusions directes à la pensée de Swedenborg, ce mystique suédois pour qui notre terre n'est que le reflet du monde éternel. Le Fanu, lui-même swedenborgien, force le trait : il nous livre une histoire où il mélange avec un malin plaisir le monde des vivants, le Monde des Esprits et l'Enfer, L'héroïne, l'innocente Maud, appartient au premier mais paraît, dans toute l'intrigue, affronter deux créatures jaillies tout droit de l'Enfer conçu par Swedenborg, des êtres moitié hommes, moitié bêtes : Silas (au regard d'oiseau de proie, à l'apparence simiesque) et Madame, l'inquiétante gouvernante française tantôt qualifiée de loup, de reptile hideux ou de goule : deux des nombreux personnages qui ne finiront pas de hanter le lecteur, une fois le livre refermé.
Domaine Romantique