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Vivons-nous dans un univers orwellien, conditionnés et surveillés en permanence par les «nouveaux maîtres du monde» ? On pourrait le penser à la lecture de certains discours critiques dénonçant le nouveau «totalitarisme» du marché et des médias. Dans cet essai stimulant, Jean-Pierre Le Goff rompt avec ce schématisme.
En s'appuyant sur Hannah Arendt et Claude Lefort, il propose une étude comparative particulièrement éclairante du phénomène totalitaire et du mouvement de modernisation de la fin du XXe siècle. Il montre ainsi que les sociétés européennes démocratiques connaissent un processus spécifique de déshumanisation et de désagrégation, bien différent du totalitarisme. Ce phénomène «post-totalitaire» constitue le point aveugle des démocraties.
C'est dans ce cadre qu'il convient de resituer le mal-être existentiel et social et la confusion des médias : le basculement historique des trente dernières années a débouché sur une vision fantasmagorique du pouvoir et un antitotalitarisme galvaudé. Pour l'auteur, le renouveau implique d'en finir avec le manichéisme et l'illusion de la table rase : les démocraties européennes doivent enfin accepter l'ambivalence de leur propre histoire, inscrire la modernisation dans une vision de l'avenir et un projet cohérent. C'est à ce prix qu'elles éviteront le repli maladif sur elles-mêmes et la rupture avec le reste du monde.
«[L'auteur] n'a de cesse de décoder son environnement. [...] C'est une nouvelle fois à une explication de texte qu'il se livre, afin de disséquer le discours ambiant autour de la dictature des marchés et des médias tout-puissants. [...] Le militant humaniste qu'est Jean-Pierre Le Goff prend la parole pour appeler à ne pas renoncer.»
Le Monde-Économie
«Le constat d'insignifiance de notre société et de la vie démocratique qui la sous-tend, loin de pousser à baisser les bras, se veut un appel volontaire au sens, voire au bon sens, ce dont nos contemporains semblent, selon Jean-Pierre Le Goff, singulièrement dépourvus. Qu'on ne cherche pas ici une expertise plus ou moins scientifique, mais plutôt le recul réflexif d'une quête des raisons anciennes et des nouveaux moyens du vivre ensemble.»
Libération