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Le premier tome de cet Antimanuel racontait la rareté, l'offre, la demande, la concurrence, le commerce, l'argent... C'était le tome des fourmis : raisonneuses, rationnelles, égoïstes, épargnantes, bref, calculatrices. Le lecteur découvrait, un peu étonné, que la compétition n'était pas le vrai moteur des échanges et qu'elle laissait souvent la place aux phénomènes de pouvoir, de mimétisme et de foule.
Voici venue la revanche des cigales ! Et si l'inutile, la gratuité, le don, l'insouciance, le plaisir, la recherche désintéressée, la poésie, la création hasardeuse engendraient de la valeur ? Et si les marchands dépendaient - ô combien ! - des poètes ? Et si la fourmi n'était rien sans la cigale ? Voici venu le temps d'affirmer, contre les économistes, que l'inutile crée de l'utilité, que la gratuité crée de la richesse, que l'intérêt ne peut exister sans le désintéressement.
On verra que ce livre ne dédaigne en rien les marchands. Mais pourquoi sont-ils devenus la classe dominante ? Pourquoi sommes-nous sortis de ces sociétés de chasseurs-cueilleurs, qui «marchaient dans la beauté», comme le chantent certaines tribus ? Nous sommes passés du côté de l'utile et du laid. Et en même temps, le capitalisme fait partie de notre vie, tout simplement, et ne mérite pas d'être méprisé, sauf à mépriser la vie.
Si l'on veut approcher l'essence du capitalisme, il faut sortir des sentiers de l'économie et musarder avec l'histoire, l'anthropologie et la psychologie.
Ce second tome se situe aux frontières ou au-delà de l'économie.