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Aucune oeuvre indienne n'a été plus lue et plus traduite dans le monde que la Bhagavadgita, ou «Chant du Bienheureux». Ce poème mystique et philosophique, rédigé en sanscrit aux alentours du IIIe siècle avant J.-C., fut élevé au rang de texte sacré par les Hindous, avant d'exercer une véritable fascination sur les lecteurs occidentaux, de Wilhelm von Humboldt à la philosophe Simone Weil, en passant par Goethe ou encore Tolstoï. Épisode le plus célèbre de la monumentale épopée du Mahabharata, il rapporte l'enseignement délivré par le dieu Krishna au guerrier Arjuna. Sur le point de prendre part à la guerre qui va l'opposer à ses propres cousins, celui-ci ne sait que faire : doit-il être fidèle à son devoir de guerrier et tuer les membres de sa famille ? doit-il renoncer à combattre au prix de son honneur militaire ? En réponse à ce dilemme, Krishna lui enseigne la doctrine de l'ascèse dans l'action. La portée de cet appel au détachement et à la méditation, nourri des hymnes sacrés de l'Inde ancienne, ne s'est jamais démentie. Gandhi, qui au XXe siècle s'est fondé sur ce texte pour mener son combat non violent contre toutes les formes d'injustice, affirmait à son sujet : «La Gita n'est pas seulement ma Bible et mon Coran, elle est plus encore : elle est ma mère.»